Johaar Mosaval
Né en 1928 à Cape Town
16 mars 2014
| 771 visits / visites
Johaar Mosaval en Puck dans Le Songe de Frederick Ashton.
Ballet royal, vers 1967. - Cliché : Roy Round.
« Je suis né en 1928, l’aîné de 10 enfants et je pratiquais la gymnastique. Dulcie Howes, fondatrice de l’University of Cape Town (UCT) Ballet m’a découvert [dans un ballet-pantomime scolaire]. A l’époque l’apartheid battait son plein – et pour moi, il n’y avait pas de place au soleil. Dulcie Howes est celle qui a cassé la barrière raciale en me faisant rentrer dans les cours de danse classique… quoique je fusse placé au fond de la salle. Les jeunes blancs me regardaient de travers si j’avais la malheur de me retrouver catapulté au devant par mes jetés. »
Mosaval a fréquenté l’UCT Ballet School entre 1947 et 1949. En raison des lois de l’apartheid, il aurait été impossible pour lui de faire une carrière scénique en Afrique du Sud. Mais un jour, les grands danseurs anglais Alicia Markova et Anton Dolin ont assisté aux cours. Mosaval poursuit : « Ils ont tout de suite décidé que j’avais un talent extraordinaire. Ce sont eux qui m’ont ouvert la voie pour Londres. J’avais 19 ans et je n’avais jamais quitté la ville de Cape Town… des gens très influents dans le milieu des arts sont venus voir mes parents pour les convaincre de me laisser partir car ce n’était pas vu comme acceptable, d’autant plus que nous sommes musulmans, et je suis le fils aîné. Me voilà à l’Ecole du Ballet royal (à l’époque, Sadler Wells Ballet School – ndlr) au mois de janvier. Londres était ensevelie sous la neige, le temps froid et affreux. Pendant mon année à l’Ecole j’ai été très bien noté à tous les examens. »
Johaar rejoint Sadlers Wells Theatre Ballet en 1952 et est promu soliste l’année suivante, puis est invité à rejoindre le Ballet royal, où il danse jusqu’en 1974 : « Je suis le premier Noir à avoir rejoint le Ballet royal et le premier Musulman. »
En 1956 Johaar Mosaval est promu soliste du Ballet royal puis en 1963, nommé étoile aux côtés de Margot Fonteyn, Beryl Grey, Nadia Nerina (sud-africaine elle aussi) et Svetlana Beriosova. Aux côtés de son compatriote noir et sud-africain David Poole (1925-1991), nommé étoile de Sadler’s Wells Theatre Ballet en 1948 et Arthur Mitchell, nommé étoile de NYCB en 1956, Mosaval devient ainsi l’une des trois premières étoiles noires d’une troupe de renommée mondiale.
David Poole et Eileen Fifield, étoiles du Sadlers Wells Ballet Company (Ballet royal), vers 1955.
David Poole, originaire d’A frique du Sud, est la première étoile noire d’une grande troupe classique. Il devint maître de ballet du Cape Performing Arts Board en 1963 puis directeur de Cape Town City Ballet en 1967. C’est lui qui lança Dance for All, qui continue à être aidée par le David Poole Trust Fund.
Ses rôles préférés étaient Puck dans Le Songe, la Danse Napolitaine dans Le Lac, et l’Oiseau Bleu dans La Belle. Il créa le rôle de Bootface dans The Lady and the Fool de John Cranko, et collabora avec les chorégraphes Ashton, Ninette de Valois, MacMillan, David Poole et tant d’autres.
En 1975, après trente ans d’exil, Mosaval décida de retourner en Afrique du Sud ; il se produit sur scène, à la télévision (il fut le premier Noir sud-africain à apparaître à l’écran), enseigne et promeut la danse classique partout dans le pays.
En 1976, Johaar Mosaval ouvrit sa propre école de danse classique ; en même temps, il fut le premier Noir nommé Inspecteur de la Danse des Ecoles sous l’Administration of Coloured Affairs (sic). Mais il démissionna du poste d’Inspecteur dès qu’il réalisa qu’il ne lui serait permis de partager son expertise qu’avec une fraction bien délimitée de la population. Les autorités interviennent alors pour fermer son école car elle était multiraciale. Néanmoins Mosaval trouva d’autres moyens de poursuivre l’enseignement.
Parmi ses nombreuses décorations : Western Cape Arts, Culture and Heritage Award (1999), Premier’s Commendation Certificate (2003) ; Cape Tercentenary Foundation’s Molteno Gold Medal (2005) ; Cape Town Civic Honours.